Au sommaire de ce numéro de septembre, l'Éditorial de Claude Lassalvy.
"L’été 2022 a été marqué par quatre épisodes successifs de canicule, des incendies d’une ampleur catastrophique, une sècheresse qui met à mal notre agriculture, impose le rationnement de l’eau et fait peser d’inquiétantes menaces sur le refroidissement de nos réacteurs nucléaires déjà bien fatigués. Cette situation est le signe d’un basculement profond dans le fonctionnement de notre société. La crise climatique nous atteint directement ! Les alertes du GIEC, longtemps perçues comme des hypothèses théoriques, se concrétisent sous nos yeux et dans notre quotidien. Notre système économique, fondé sur l’exploitation outrancière des énergies fossiles et la quête jusqu’à l’absurde d’un profit toujours plus grand, concentré entre les mains de quelques fortunes, conduit depuis quarante ans notre société à sa perte.
Un message de sobriété a été adressé par le président de la République et sa première ministre. Mais dans le même temps, des signaux négatifs se sont multipliés : complaisance à l’égard d’une monarchie du Golfe pour s’assurer un approvisionnement en diesel, subvention uniforme aux prix des carburants sans tenir compte des besoins et des ressources des bénéficiaires, refus de taxer les profiteurs de crise au premier rang desquels le géant pétrolier TotalEnergies... Les réponses du gouvernement ne sont pas à la hauteur de la situation, qu’il s’agisse de transition énergétique, de gestion de l’eau, ou de prévention des incendies. Le dérèglement climatique est lié au creusement des injustices sociales. Les très riches ont un bilan carbone beaucoup plus négatif que les plus modestes. Certains esprits curieux ont conçu des outils permettant d’évaluer la consommation énergétique liée aux déplacements en jet privé des grandes fortunes, au rang desquels notre Bernard Arnault national et son comparse Vincent Bolloré. Les intéressés ont peu apprécié, mais la démarche est légale. Et la dénonciation de ces comportements de prédateurs relève d’un acte civique.
Dans le même registre, même si l’ampleur du préjudice causé est sans commune mesure, la prestation de notre président de la République sur son scooter des mers relevait, pour le moins, d’une maladresse infinie. La sobriété doit désormais s’imposer à tous, mais en ciblant d’abord les catégories les plus polluantes et émettrices de carbone. Quant aux plus modestes, c’est sur eux qu’il faudrait concentrer les aides, prioritairement pour ce qui concerne l’isolation thermique des logements. Et dans ce domaine, les retraités, locataires ou propriétaires, sont parmi les plus exposés, pour une part d’entre eux, parce qu’ils occupent des logements anciens inadaptés au réchauffement climatique. Ignorer la corrélation entre crise climatique et précarité sociale, c’est prendre le risque de générer à court terme une nouvelle crise des « gilets jaunes ». La sobriété doit être conjuguée avec l’équité, sans quoi elle se déclinera sous la forme d’une austérité imposée aux plus modestes. Et celle-ci serait inacceptable dans le contexte que nous vivons."